Est-il temps de mettre en œuvre la solution à deux États, c'est-à-dire de reconnaître l'Autorité palestinienne (AP) à moitié souveraine comme État, en tant que « Palestine », aux côtés d'Israël ?
Il fut un temps où Netanyahou (à gauche) et Biden s'entendaient bien. |
Premièrement, les gouvernements américain et israélien ont tous deux publiquement accepté le principe d'un État palestinien. Le président George W. Bush l'a fait en 2002 et Netanyahou lui-même en 2009. Il est vrai que Netanyahou a changé d'avis par la suite mais le reste du monde ne le laissera pas revenir sur une décision déjà actée depuis 15 ans. Tenter de revenir sur cet accord équivaut à un effort d'arrière-garde voué à l'échec.
En 1936-1937, l'Orchestre de Palestine était une institution juive. |
Mais quelle sorte de Palestine ? C'est là que réside le deuxième domaine d'accord entre Washington et Jérusalem. Chacun l'a accepté à condition d'une refonte complète de la conduite palestinienne. Chacun posait trois conditions préalables. Bush a proposé « le soutien américain à la création d'un État de Palestine provisoire... pour autant que les Palestiniens adoptent la démocratie, luttent contre la corruption et rejettent fermement le terrorisme ». Netanyahou a décrit les conditions d'Israël comme une « garantie concernant la démilitarisation [de la Palestine, NdT] et les besoins de sécurité d'Israël », ainsi que la reconnaissance d'Israël « en tant qu'État du peuple juif ».
L'ensemble de ces revendications – qui demeurent aujourd'hui aussi centrales qu'au moment où elles ont été exprimées pour la première fois – nécessitent une transformation des attitudes et des actions palestiniennes (Néanmoins, ces revendications restent partielles et il faudrait y ajouter d'autres exigences à savoir, la fin de la diffamation d'Israël par l'AP, la reconnaissance de Jérusalem comme capitale et la normalisation complète des relations).
Malheureusement, ces six conditions ont pratiquement disparu de la mémoire collective, oubliées par les États-Unis et Israël qui se sont désormais lancés dans un débat inutile sur la question « oui ou non à la Palestine ? ». En rappelant ces conditions, les deux gouvernements peuvent s'engager dans une discussion pragmatique et constructive sur la question de savoir si « l'Autorité palestinienne a rempli ou non les conditions préalables ».
L'Autorité palestinienne, qui fêtera ses 30 ans le mois prochain, dispose d'un passif considérable sur lequel on peut la juger. Voici une évaluation récapitulative de chacune de ces six exigences israélo-américaines :
- Établir la démocratie. Le chef de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, en est à la vingtième année de son mandat de 4 ans et va même jusqu'à rejeter la tenue d'élections truquées typiques des tyrans qui se prétendent démocrates.
- Réduire la corruption. Ghaith al-Omari, ancien conseiller d'Abbas, constate que « 87 % des Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza pensent que l'Autorité palestinienne est corrompue ».
- Rejeter le terrorisme. L'Autorité palestinienne célèbre effrontément le meurtre d'Israéliens. Par exemple, un sermon télévisé déclarait que « toutes les armes doivent être dirigées contre les Juifs ». L'AP s'est également vantée du rôle qu'elle a joué le 7 octobre.
- Démilitariser. L'Autorité palestinienne compte plus de 83.000 agents de sécurité auxquels elle consacre un tiers de son budget, ce qui en fait (avec le Hamas) la société la plus militarisée au monde (Seule la Corée du Nord atteint un tel pourcentage).
- Garantir les besoins de sécurité d'Israël. L'année dernière, l'AP a approuvé l'idée de « faire exploser toutes les villes de l'entité sioniste ».
- Reconnaître Israël comme l'État juif. Abbas rejette catégoriquement cette proposition et se moque des Israéliens : « Appelez-vous comme vous voulez, moi, je ne l'accepterai pas. »
L'Autorité palestinienne ne respecte aucune des conditions définies conjointement par les États-Unis et Israël, ce qui laisse à Washington et Jérusalem pas mal de pain sur la planche. Il est temps de mettre fin aux querelles inutiles et de s'efforcer d'amener Abbas et son régime à répondre à ces exigences de bon sens, par exemple en réduisant la militarisation à outrance de l'Autorité palestinienne. En conséquence, je souhaiterais humblement soumettre à chacun des deux gouvernements quelques conseils.
Israel Victory: How Zionists Win Acceptance and Palestinians Get Liberated [La victoire d'Israël : le moyen pour les sionistes d'être acceptés et pour les Palestiniens d'être libérés] sera publié en juin 2024. |
Washington : Arrêtez d'ignorer que l'AP n'a apporté aucun des changements demandés. Faites porter la responsabilité du changement sur les Palestiniens. Mettez-les au défi de se montrer dignes d'un État souverain.
Et comment pourrait-on faire pression sur les Palestiniens pour qu'ils procèdent à ces changements ? Grâce à ce que j'appelle la Victoire d'Israël, un projet qui consiste à convaincre les Palestiniens qu'ils ont perdu leur long combat contre Israël et que le moment est enfin venu pour eux de se réconcilier avec l'État juif. Plus précisément, cela signifie qu'Israël doit mettre fin au règne de deux organisations immondes, l'AP et le Hamas, la première par l'asphyxie financière et l'autre par la destruction, comme c'est actuellement le cas à Gaza. Ce n'est qu'ensuite qu'Israël pourra donner du pouvoir à ces nombreux Palestiniens prêts à vivre en harmonie avec lui en les finançant, en leur donnant une voix et en les incluant dans la gouvernance.
Daniel Pipes est le président du Middle East Forum et l'auteur de Islamism vs. The West: 35 Years of Geopolitical Struggle (Wicked Son, 2023) © 2024 par Daniel Pipes. Tous droits réservés.