Ce qui suit se compose de lettres de lecteurs et d'une réponse de Daniel Pipes
A l'éditeur:
Daniel Pipes nous inclut dans un groupe de professeurs d'université qui "nient que le djihad ait une signification militaire quelle qu'elle soit» [Commentary, novembre 2002, disponible à Le jihad et les professeurs ]. Bien que nous ayons généralement respecté M. Pipes en tant que chercheur, il a, s'agissant de nous, absolument et totalement tort sur cette question. Depuis un an et plus, nous avons tenu exactement le point de vue opposé dans des conférences à propos du djihad devant divers publics (y compris à l'US Naval Academy et à l'Université de Notre Dame). En Juin / Juillet 2002 à la sortie de First Things, James Turner Johnson a expliqué sa compréhension de la notion de «djihad de l'épée" dans la tradition islamique, ainsi que l'utilisation explicite d'Oussama ben Laden de cette tradition dans une fatwa de 1998. La même chose fut présentée par John Kelsay dans les ouvrages parus récemment in America (en Amérique) et Christian Century (le siècle chrétien).
C'est certainement vrai que, dans le Coran, le mot jihad s'applique au combat intérieur pour la soumission à Dieu, mais c'est faire un grand bond et [qui plus est] injustifié de conclure de cela qu'il y a déni de son sens militaire. En effet, l'utilisation de ce mot s'applique à des guerres qui renvoient au prophète Muhammad et à la communauté musulmane d'origine , et la prise de position développée sur le jihad de l'épée est un élément dans la loi islamique qui commence à la fin du 8ème siècle. Une version déformée de cette idée est l'une des pierres angulaires du djihadisme contemporain.
JOHN KELSAY
Université de Princeton
Princeton, New Jersey
JAMES TURNER JOHNSON
Rutgers University
New Brunswick, New Jersey
A l'éditeur:
Bien que j'admire depuis longtemps et aie profité de la perspicacité scientifique de Daniel Pipes, il fait à John Kelsay une grave injustice, quand il écrit dans «le djihad et les professeurs» que Kelsay est d'accord avec ceux qui «nient que le djihad a une signification militaire quelle qu'elle soit."
Kelsay est un savant prudent et responsable dont les opinions ne justifient pas l'accusation de M. Pipes. Dans son livre Islam and War : A Study in Comparative Ethics (L'Islam et la guerre: une étude comparative de l'éthique) (1993), par exemple, Kelsay note la division sunnite du monde en dar al-Islam, le territoire où les normes islamiques ont une reconnaissance officielle, et dar al-harb, le territoire où «l'ignorance de Dieu» est dit l'emporter. Kelsay décrit avec précision le point de vue islamique
le territoire de l'Islam. . . ne pouvait pas être un endroit sûr jusqu'à ce que et à moins que l'hégémonie islamique ait été reconnue partout. Assurer l'hégémonie tel était le but du jihad, ou "la lutte dans le chemin de Dieu." Selon les théoriciens sunnites, la guerre ou le djihad par le biais de la mise à mort est justifiée lorsqu'un peuple résiste ou s'oppose aux objectifs légitimes de l'Islam.
Dans les articles plus récents, il a explicitement décrit à la fois la composante agressive militaire du djihad et certaines des plus importantes justifications qui le défendent.
Daniel Pipes a apporté une exceptionnelle contribution à notre compréhension de la confrontation de l'Islam avec le monde moderne. Il serait dommage que la valeur de son travail soit diminuée par des caractérisations inexactes, - peu importe si c'est de façon involontaire- concernant les contributions d'autres chercheurs.
RICHARD L. RUBENSTEIN
Université de Bridgeport
Fairfield, Connecticut
A l'éditeur:
Daniel Pipes se déclare très préoccupé par la falsification des faits par les chercheurs américains qui devraient connaître mieux [leur matière]. Pourtant, il fait deux réclamations, à mon sujet, les deux sont fausses. Premièrement, il prétend que je suis l'auteur d'un livre intitulé The Road to Kandahar: A Genealogy of jihad in Modern Islamist Political Thought. Bien que j'aie donné une conférence publique avec ce titre, je n'ai publié aucun article ou un livre sous ce titre ; le livre que j'ai écrit est intitulé Enemy in the Mirror : Islamic Fundamentalism and the Limits of Modern Rationalism (1999).
En outre, M. Pipes m'attribue la position selon laquelle il n'y a pas de composante militaire dans le djihad. Ce n'est pas une position que je tiens, ni que j'ai jamais défendue. Dans la conférence à partir de laquelle M. Pipes prend ses citations (mais à laquelle il n'a pas assisté), j'ai dit clairement que les musulmans dans le passé et le présent ont interprété le djihad d'une façon qui a entraîné une série d'actions, à la fois militaires et non militaires. Pour citer ma propre conférence, j'ai soutenu que la doctrine juridique du djihad le définit comme «force légitime de défense et d'expansion de l'Islam», et que les islamistes tels que Sayyid Qutb se sont inspirés de cette doctrine pour rejeter l'argument que le djihad est essentiellement spirituel ou défensif. Qutb a fait valoir que le djihad est nécessaire pour «débarrasser le monde de la jahiliyya [ignorance] et pour établir la souveraineté divine." Ses objectifs ont inclus ce qu'il considérait comme le «plus récent dar al-harb-l'Occident" et tous les musulmans qui étaient en désaccord avec sa vision de ce que l'islam ou le djihad est vraiment. Dans le livre que j'ai écrit, je développe cet argument de manière plus détaillée.
ROXANNE L. EUBEN
Wellesley College
Wellesley, Massachusetts
A l'éditeur:
Le djihad est clairement confirmé dans le Coran dans les cas d'oppression et d'injustice, et il est naïf de la part des apologistes universitaires de l'islam de se concentrer uniquement sur son aspect de lutte intérieure. Mais l'affirmation de Daniel Pipes que le jihad est destiné à imposer l'islam aux non-musulmans est démentie par le verset du Coran qui dit, "il n'y a pas de contrainte en religion." Même dans les cas où la lutte armée est autorisée, il y a des directives strictes en matière islamique: On ne doit pas traiter avec l'autre nation, il faut lui donner un avertissement équitable de renoncer à son comportement, et les combats doivent cesser lorsque l'oppression a cessé. En aucun cas, le djihad ne prend une posture offensive ou, comme M. Pipes le pense- n'agit comme un outil de domination musulmane.
Il y a certainement des exemples historiques où les musulmans ont fait la guerre aux non-musulmans sans juste cause. Mais les musulmans les plus instruits croient que Dieu n'était pas du côté des musulmans qui ont commis ces excès, car ils avaient franchi les limites de la loi islamique. Les guerres liées à la victoire et l'expansion islamiques ont été en grande partie des guerres défensives dans lesquelles les musulmans ont combattu les non-musulmans qui ont opprimé les minorités musulmanes.
ERFAN IBRAHIM
San Ramon, Californie
A l'éditeur:
Daniel Pipes est connu pour ses diatribes contre l'islam et les musulmans. A la lecture de son article sur «le djihad et les professeurs», j'ai pensé, «nous y revoilà!"
M. Pipes affirme que les professeurs et les musulmans épris de paix ont tort quand ils disent que jihad signifie «résister aux tentations et devenir une meilleure personne», et que la définition d'Oussama Ben Laden de l'expression comme «l'effort juridique, obligatoire, collectif pour étendre les territoires gouvernés par les musulmans... au détriment des territoires régis par les non-musulmans "est la seule correcte. Pour appuyer cette affirmation, il cite les luttes musulmanes en Algérie, en Égypte, au Soudan, en Tchétchénie et au Cachemire (bien qu'il laisse en quelque sorte en dehors la Palestine). Pourtant, en Tchétchénie, au Cachemire et en Palestine, il est des musulmans qui sont les victimes de l'expansion territoriale, et les luttes en Algérie et en Egypte sont au sein de la communauté musulmane.
M. Pipes a également tort quand il prétend que Mahomet s'est
engagé dans 78 combats, un seul d'entre eux étant défensif. En fait, il a mené trois batailles (dont le nombre total de victimes ne dépasse pas 136), et toutes étaient défensives. Muhammad a considéré la vie humaine comme sacrée et a évité la violence à tout prix. L'islam est la religion qui croît le plus en Occident aujourd'hui, et ce n'est certainement pas en raison du djihad ou de la coercition.
SHAFI REFAI
Président
United Muslims of America
Fremont, Californie
A l'éditeur:
L'erreur fatale dans l'argumentation de Daniel Pipes est qu'il ne tient pas compte de la matière sur le djihad et la guerre dans le Coran lui-même. En fait, lorsque le terme jihad apparaît dans le Coran, il indique toujours la lutte intérieure pour être un bon musulman. Jamais cela n'indique l'action armée ou militaire.
M. Pipes fait aussi l'erreur de penser que chaque guerre dans laquelle les musulmans prennent part doit être étiquetée djihad. Ce n'est pas le cas. Les règles du Coran sur la guerre sont claires, et beaucoup d'entre elles seraient en résonance avec les enseignements de la «guerre juste»d'Augustin..
Pour sûr, le djihad peut être violent et militariste. Le Coran affirme que "le sang de mon ennemi est licite pour moi" lorsque l'ennemi empêche un musulman d'accomplir l'un des cinq piliers de l'islam. Dans l'histoire récente, qui a tenté d'empêcher les musulmans d'accomplir leurs obligations? Le Shah en Iran, les Soviétiques en Afghanistan, et Israël, qui, jusqu'à récemment interdit aux Palestiniens de faire le hadj. En tant que question de politique et de pratique, les États-Unis n'ont jamais empêché les musulmans de pratiquer leur foi. Par conséquent, ceux qui prétendent que le djihad est contre l"Amérique emploient improprement un terme sacré pour légitimer le terrorisme.
Les groupes militants qui estiment que le terme djihad justifie leur intolérance pour la culture occidentale ont utilisé le terme de façon incorrecte pour les 25 dernières années. C'est cette utilisation récente, plutôt que les 1.400 années précédentes de la tradition, que M. Pipes estime à tort être la norme .
THOMAS S. FERGUSON
Manhattan College
Riverdale, New York
A l'éditeur:
Daniel Pipes fait peu la distinction entre les islamistes qui offrent une interprétation pacifique du jihad dans le but de déformer leurs propres fins et les musulmans modérés qui font de même dans le cadre d'un processus d'ajustement de l'Islam au monde contemporain et à la religion civique américaine. Pourtant, le succès de l'Amérique à réaliser la courtoisie entre les divers groupes religieux vient en partie de distinctions très vagues et l'impasse sur les doctrines religieuses. Les Américains entrent dans leurs lieux de culte et s'avouent une variété de choses, les plus sources de discorde(ou gênantes) de laquelle ils autorisent de cesser de pratiquer. Pour citer quelques exemples bibliques qui viennent à l'esprit, «Aucun homme ne vient au Père que par moi" (Jean 14:6) a des conséquences que nous ne considérons plus qu'il convienne de prendre au sérieux, tout comme "Tu ne laisseras point une sorcière vivre »(Exode 22:17).
Beaucoup de nos religions et sectes ont des histoires sanglantes et quelques mauvaises doctrines. À une époque où de nombreux musulmans américains veulent s'éloigner autant que possible de l'Islam militant, voulons-nous vraiment les échauffer par rapport à l'exactitude historique et la clarté conceptuelle? Certaines des déclarations que M. Pipes cite sont pour moi comme des sermons moralisateurs américains: fastidieux, mais fondamentalement des tentatives saines d'exégèse civilisée.
VIRGIL E VICKERS
Newton, Massachusetts
A l'éditeur:
Je vous remercie pour l'impression de l'article brutalement honnête et profondément inquiétant de Daniel Pipes. Il est très difficile pour les gens nourris depuis l'enfance des principes des droits de l'homme, des libertés individuelles, et de l'amour de la paix de comprendre le programme djihadiste. M. Pipes a raison de nous forcer à regarder cette brute dans les yeux et à reconnaître sa vraie nature. Peut-être qu'une plus grande attention devrait être accordée au rôle joué par nos propres traditions occidentales d'équilibre (dans la presse), de nuance (dans la diplomatie), et de scepticisme (dans le monde universitaire) en nous gardant de traiter avec un mouvement qui voit le monde en termes tranchés de noir et blanc, bien contre le mal.
DIANE KRIEGER
Torrance, Californie
A l'éditeur:
Les déclarations de propagande à propos du djihad qui sont dominantes dans nos universités sont encouragées par notre propre direction politique , qui a déclaré que nous sommes en guerre contre le «terrorisme», une guerre, cependant, dans lequel on trouve non pas des ennemis, mais les islamistes. Le président Bush a évoqué à maintes reprises l'islam comme une religion pacifique à partir de laquelle Oussama ben Laden et ses semblables ne sont que des déviants.
Je ne sais pas si ce fantasme est le résultat de l'ignorance, du politiquement correct, ou de la croissance ici d'une communauté musulmane. Si cette tendance de déclarer l'islam une religion pacifique semblable au christianisme et au judaïsme se poursuit, nous pourrions nous retrouver pris au piège dans la même situation avec notre communauté musulmane que les Européens de l'Ouest sont avec la leur. Nous sommes maintenant en guerre contre l'islam, et en tirant le rideau sur cela, nous appelons à notre propre fin.
FREDERIC WILE
New York City
A l'éditeur:
À l'appui de la thèse de Daniel Pipes, je vous propose une citation de Conditions of Liberty(1994) par le regretté Ernest Gellner, qui a enseigné à la London School of Economics et a beaucoup écrit sur les sociétés musulmanes. Comme il a observé, bien avant le massacre de 11 septembre
Le droit musulman oblige officiellement les dirigeants musulmans à mener la guerre sainte pour l'extension de la foi tous les dix ans au minimum- dix ans étant la durée maximale autorisée pour une trêve avec les infidèles, si les conditions sont propices et si la victoire a des chances raisonnables. Qui sait quand, étant donné les potentiels imprévisibles de la technologie moderne, cette dernière condition peut ne pas sembler être remplie? Certains d'entre eux tranquillement ignorent cette obligation et continueront de le faire. Certains peut-être pas.
BERNARD RUDICH
Bronx, New York
A l'éditeur:
Daniel Pipes est à saluer. J'avais innocemment pensé que les universités étaient consacrés à la vérité, mais je ne peut plus ignorer les preuves accablantes du contraire.
Richard K. MASON
Altadena, Californie
Daniel Pipes écrit:
John Kelsay et James Turner Johnson protestent (et Richard L. Rubenstein les appuie) que leur travail de recherche reconnaît le caractère militaire du djihad. Je suis ravi de l'apprendre. Mais l'enquête de "Jihad et les professeurs" a été expressément limitée
à ce que disent les professeurs à un public général. "Voir ce qui est dit au public," je l'ai dit dans ma note de bas de page 18, "J'ai regardé des éditoriaux, des citations d'articles de journaux, et des entrevues à la télévision plutôt que les articles dans des revues savantes." Ce que j'ai trouvé a suggéré que ces deux messieurs nient au jihad la composante militaire.
Ceci, par exemple, est une transcription de la chaîne NewsChannel Cleveland 5, en date du 14 Septembre 2001:
Kelsay a consacré sa vie à étudier l'islam et il enseigne ce semestre à l'Université John Carroll. Il a dit que les gens comprennent mal et interprètent mal les termes islamiques comme le djihad. Kelsay a déclaré que le djihad signifie lutter, et pour le musulman le plus grand combat ou djihad consiste à mener une vie obéissant à la loi de Dieu, des règles qui interdisent absolument les attaques contre des personnes innocentes comme le mardi [11septembre]. "Du point de vue de la loi islamique, c'est interdit. Ce n'est pas une partie du raisonnement islamique sur les lois de la guerre", a déclaré Kelsay.
De même, quand j'ai regardé le journal de la Rutgers University School, le Daily Targum, j'ai trouvé ce qui suit pour le 5 octobre 2001:
James Johnson, professeur de religion, a expliqué que le terme «guerre sainte» est, intrinsèquement, ni chrétien, ni musulman. «Jihad», pour l'Islam, signifie «la lutte dans le chemin de Dieu ». «guerre sainte» n'est pas apparu jusqu'après la Réforme protestante.
Roxanne L. Euben a bien sûr raison quand elle dit qu'elle n'a pas écrit un livre avec le titre que je lui prêtais. Par erreur je me suis reposé sur le Daily Northwestern du 21 janvier 2002. ("Dans une conférence à laquelle ont assisté environ 25 étudiants vendredi à Scott Hall, Euben a parlé de son récent ouvrage intitulé The Road of Kandahar : A Genealogy of Jihad in Modern Islamist Political Thought » )Je m'excuse auprès du Professeur Euben de répéter ce qui s'avère être une erreur. Quant à son affirmation selon laquelle elle reconnaît une composante militaire au djihad, de nouveau je suis heureux de l'entendre et - encore une fois je souligne que mon analyse s'est limitée aux articles de journaux et aux reportages de télévision. Le Quotidien le Daily Northwestern a couvert son discours comme suit:
La représentation du djihad comme une croisade archaïque caractérisée par la violence a contribué, dit Euben, à une méconnaissance de l'islam. "Pour beaucoup de musulmans, le djihad signifie résister à la tentation et devenir une personne meilleure", a déclaré Euben. «L'islam n'est pas plus intrinsèquement violent [que] le christianisme n'est fondamentalement pacifique.... Euben a déclaré que le jihad était dérivé du mot arabe lutte et signifiait lutter dans le chemin de Dieu. Euben dit que cette lutte se réfère principalement à un conflit interne entre bonnes et mauvaises forces de l'âme.
Strictement parlant, donc, ma caractérisation des déclarations publiques faites par les professeurs Kelsay, Johnson, et Euben était correcte. Mais je suis heureux d'accepter qu'ils disent que leurs écrits savants montrent qu'ils ne sont pas dans les affaires de blanchiment du djihad ; il est bon de savoir qu'il y a des voix honnêtes dans l'académie. Malheureusement, les déplacer hors de la liste des apologistes ne réduit que légèrement mon argument, à moins que je me trompe dans les autres cas aussi et jusqu'à présent il n'y a aucune preuve de cela, nous sommes toujours à gauche avec les neuf autres dixièmes des professeurs que j'ai interrogés qui prétendent que le djihad n'est pas ce qu'il est.
Erfan Ibrahim m'attribue à tort le point de vue que «le djihad est destiné à imposer l'islam aux non-musulmans." Comme j'ai rendu cela tout à fait clair dans «le djihad et les professeurs», ma définition du terme n'a rien à voir avec la conversion religieuse et tout à voir avec le contrôle des terres. Le Jihad, ai-je écrit, est «l'effort juridique, obligatoire, commun pour étendre les territoires gouvernés par les musulmans (connus en arabe comme dar al-Islam) au détriment des territoires régis par les non-musulmans (dar al-harb)." La seconde assertion de M. Ibrahim, qu'«en aucun cas, le djihad ne prend une posture offensive ou... agit comme un outil de la domination musulmane,« est un exemple de l'apologétique que mon article expose. Il ne tient pas compte des siècles de décisions à propos du djihad, sans parler des campagnes militaires qui ont établi la domination musulmane de Marrakech au Bangladesh.
Shafi Refai prend un mauvais départ quand il affirme que je suis "connu pour mes diatribes contre l'islam et les musulmans" ; aimerait-il que je lui rende la pareille en faisant allusion au fait qu'il est «connu» pour héberger un programme islamiste? Au lieu de cela, tenons-nous en à ce que chacun de nous dit et écrit en fait.
M. Refai fait deux remarques. Sa déclaration sur les origines de ce qu'il appelle délicatement «Les luttes musulmanes» en Algérie, en Égypte, au Soudan, en Tchétchénie et au Cachemire touche à ma thèse, qui était que le djihad a été la principale motivation à la violence dans tous ces endroits. Quant à son affirmation selon laquelle Muhammad s'est engagé dans trois plutôt que (comme je l'ai dit) 78 batailles, c'est une différence de sémantique, la source de mes statistiques définit évidemment "bataille" de façon un peu plus large que ce que fait M. Refai.
Thomas S. Ferguson trahit une croyance naïve que le Coran seul compte dans la loi et la vie islamiques. C'est à peu près analogue à affirmer que la Constitution est la seule loi dans les États-Unis. Tant le Coran que la Constitution sont les fondements de systèmes juridiques complexes ; ignorer ces systèmes c'est ignorer le monde réel dans lequel les musulmans et les Américains vivent. Les non -spécialistes ont tendance à trop insister sur le Coran, qui est beaucoup plus facile à saisir que le corpus vaste et souvent contradictoire appelé la charia qui est énorme à expliquer. Mais c'est ce dernier qui représente la compréhension de la loi musulmane, y compris la loi de djihad.
Virgile E. Vickers me réprimande de ne pas autoriser les musulmans modérés à réinterpréter le jihad "dans le cadre d'un processus d'ajustement de l'Islam au monde contemporain." Il soulève un point important, et qui, j'espère reviendra à l'avenir. Ici, permettez-moi de répondre brièvement que bien sûr, je souhaite ardemment voir le djihad se transformer en rien de plus offensif qu'une morale d'amélioration de soi. Mais une telle évolution ne peut avoir lieu que dans le cadre d'une franche reconnaissance de ce que le djihad a signifié à travers les siècles. Nier cette histoire, comme les musulmans et leurs apologistes universitaires le font si souvent, réduit effectivement la valeur des efforts de réinterprétation. Voici une analogie: L'Allemagne de l'Ouest a reconnu les horreurs des actions de ses citoyens au cours de la Seconde Guerre mondiale, et par là même s'est réhabilitée, alors que l'Allemagne de l'Est, l'Autriche et le Japon continuent à payer le prix de leur refus de s'attaquer au problème de cette période de leur histoire.
Je remercie Diane Krieger, Frédéric Wile, Bernard Rudich, et Richard K. Mason pour leur soutien et leur encouragement.